Les mois passèrent, et dès la fin de novembre Jeanne et son frère avaient coutume d’afficher chacun la liste des choses qui leur faisaient envie.
Et quand vint la veillée de Noël, la famille préparait des surprises et le mystère qui les entourait était un grand amusement pour la petite Jeanne qui croyait encore au père Noël.
La soirée était froide, les carreaux étaient chargés de givre, dès l’après-midi, il fallait allumer la lumière. Pas un oiseau, tout semblait dormir.
Dans l’immobilisme de l’air Jeanne et son frère attendaient en silence que vienne minuit.
Son frère lui, ne croyait plus au père Noël depuis bien longtemps, mais jamais il ne dévoila le secret à sa sœur qui se laissait toujours gouverner par la fantaisie, il la laissait croire qu’il existait vraiment .
Dès le crépuscule, leur mère préparait déjà les petits bas et les accrochait aux parois de la cheminée afin que le père Noël les remplisse de bonnes choses.
Quel mystère pour Jeanne qui se demandait comment aurait-il fait cette nuit là pour passer dans l’ âtre si étroit et aussi flamboyant.
Sa maman souriait devant son ingénuité.
Des mots couverts, des chuchotements, des rires étouffés intriguaient Jeanne qui aurait voulu savoir pourquoi tant de mystères…
La table était parée à fête, ornée de guirlandes dorées et d’un menu copieux. Il y avait de la dinde, chose rare durant toute l’année, des marrons, et bien d’autres gourmandises … Tous se mirent à table et à repas terminé, ils dégustèrent la bûche de Noël que Jeanne adorait: (tradition culinaire, rite lié à la célébration du solstice d'hiver)*, et quand le gong de la pendule annonça minuit, toute la famille se réunit auprès de la crèche pour y coucher le petit Jésus qui venait de naître.
Les santons, les bergers et leurs moutons, les anges, tous étaient là à l’attendre ainsi que Joseph et Marie dans l’étable assis sur la paille entourés du bœuf et du petit âne qui les réchauffaient de leur haleine… Une étoile illuminait le chemin des Rois mages, un petit ruisseau faisait couler son eau claire…
Quelle solennité.
Puis, après la prière du soir, tous allèrent se coucher en attendant le matin que s’ouvrirent les portes de la salle à manger…
Jeanne dormit très peu cette nuit là… et le matin de Noël, elle pénétra ainsi que son frère en cortège, chacun cherchant son cadeau dans le fouillis fouillis des paquets enveloppés dans des papiers bariolés, ficelés d'un cordon de satin.
Les bas pendaient, gonflés de surprises sur les parois de la cheminée qui flamboyait encore.
Jeanne faisait des sauts de joie… elle ne pensa plus à comment le père noël avait fait pour s’introduire dans l’âtre flamboyant cette nuit là.
Elle plongeait ses mains dans les bas surchargés de bonnes choses… elle y trouvait de tout… des bonbons, du chocolat… et bien des charbons aussi. Elle mettait son nez partout et jubilait de joie… Le père Noël l’ avait choyée… Le tricycle tant désiré, une petite poussette...
Tout ce qu’elle avait désiré était là sous ses yeux ahuris de surprise et de joie.
Elle pédala bien des fois dans le village avec ses petites amies, et promena souvent sa petite poupée en toile bourrée de son* qui avait appartenu à sa grand-mère et puis à sa mère. C’était une vieille poupée, elle était vêtue d’une robe de futaine* grise et d’un fichu de laine rouge.
Jeanne l’adorait et ne s’en séparait jamais.
Elle se coucha ce soir là, et tous les suivants encore, avec tous ses jouets dans sa chambre, gardant même sur son lit son bas comble de gourmandises et sa poupée preferée dans ses bras.
Elle s’endormait songeuse pour s’éveiller ensuite de meilleure heure que de coutume pour les revoir tous rassemblés (…)