Jeanne, qui depuis des mois désormais, n'était traversée par aucun appétit, aucune envie, aucun élan, tombait de nouveau follement amoureuse!
Cette seule disposition de son cœur suffisait à l'enivrer, tant il est vrai que la passion éloigne des anxiétés, des tourments, des incertitudes de la jouvence...
Ses journées commençaient à s'écouler entièrement consacrées au plaisir, et son plaisir était de celui qu'on ressent à dix huit ans, elle avait soif de vivre, de sens, sa vie ne pouvait se résumer à une procession de moments vides.
Aimer devait demeurer un vertige, une fête étourdissante et quand ils se rencontrèrent pour l'énième fois, elle et son Umberto, ils s'en allèrent à Cassis, ville touristique de Marseille, célèbre pour ses falaises et ses calanques, également connue pour ses vins (blanc, mais aussi rosé).
“Ô souvenance, souvenance savoureuse ,mémorable”…
Cassis était un lieu enchanté.
Sous une température invitante, tel un énorme disque de feu, le soleil trouait le voile du ciel dont le bleu uniforme semblait vibrer avec une intensité qui faisait mal aux yeux… Jeanne épiait la nature, le panorama était d’un ravissement extrême, tout était si vert, si bleu…
Ormes de peupliers fléchissaient leurs dos verdoyants sous le léger souffle d’un petit vent chaud, ils semblaient saluer leur passage et leur amour éclos…
Le chant des oiseaux, le martellement de son cœur l’étourdissaient, tout bruissait autour d’elle, elle se laissait aller sous les caresses de cet homme qui l’aimait et qu’elle aimait, puis à l’orée d’un sentier, , ils se dissipèrent lentement dans l’ombre, et hors d'atteinte, ils s’enlacèrent impétueusement, s’allongèrent sur un tapis de feuilles dont le froissement fut chant sublime, et c'est là, qu'Umberto lui fit l'amour.
Jamais conte de fées fut si enchanté, ensorcelant… et depuis, s'aurait été difficile qu'ils ne se fondent ensemble quand personne ne les surveillait.
Ils ne le faisaient pas exprès, il y avait dans l'effleurement de leurs chairs comme une nécessité, une urgence à laquelle ils ne pouvaient échapper. Leurs corps exigeaient leur dû, ils avaient faim l’un de l’autre et devaient se rassasier, se ravitailler, se sustenter.
Et cet ainsi, que ses peurs, qui un temps s'insinuaient dans ses veines, se dissipèrent, les tourments qui la catapultaient dans son enfance disparurent, au moins en apparence, c'était maintenant son cœur de jeune fille qui battait la chamade dans sa poitrine, la lymphe qui montait dans ses membres irriguait son cerveau.
Le soir venu, elle s'assouvit dans son lit avec une volupté adorable, elle se laissait flotter dans la souvenance de cette magnifique journée et pérorait dans son sommeil… “la nostalgie n'existe pas, l'essoufflement non plus, les élans et les désirs ne te quittent jamais”… Quand on a trop mal, comme quand Jeanne perdit d’abord son père et puis son Jeacques, la mort lui paraissait bien tentante... et tout à coup, elle retrouva la légèreté dans son cœur.
L'Amour de cet homme délicat, élégant, intelligent, lui procurait un vrai bonheur, elle ne s'était plus endormie aussi peinarde...
Elle qui ne connût jusqu'à présent, malgré son jeune âge, que le lourd sommeil des grands qui ne délestent jamais complètement le fardeau d'un tourment bien caché.
Elle s'offrit à Morphée cette nuit là, comme elle s'offrit à Umberto, pleine de volupté charnelle.
Sommeil réparateur pleuplé de doux rêves... Quel dodo!
Il n'y a que l'amour pour vaincre les incertitudes, c'est un sentiment qui vient de l'âme, un cri charnel qui fleurit avec le temps, c'est un chant mélodieux qui contient toutes les joies du monde, c'est surtout un oubli de soi-même...
Un mélange de réalité et de rêve et la folie te prend...c'est une tourmente, les sens tourbillonnent te chavirent et t'engloutissent dans l'abîme de la suave extase, c'est ça l'Amour!